La propriété par étage en droit de superficie
Il a beaucoup été question de la « propriété par étage en droit de superficie » dans le cadre de la votation genevoise sur la loi dite « PAV », Praille-Accacias-Vernet, en juin dernier. L’enjeu était important mais la notion juridique est plutôt méconnue du grand public.
Pour rappel, l’enjeu de cette votation était de déterminer, notamment, la proportion de logements, respectivement d’emplois, à créer sur ce secteur important de Genève dont les terrains sont actuellement principalement voués à des activités industrielles et artisanales.
Dans ce contexte, la loi soumise au vote proposait qu’au moins 88% des logements construits soient des logements locatifs, et au maximum 12% soient des logements en propriété par étage (PPE) sur des terrains de l’Etat, et c’est là toute la subtilité car l’Etat veut garder la propriété de ces terrains.
Quelle est la différence entre une PPE usuelle et une PPE en superficie ?
Vous connaissez tous certainement la propriété par étage usuelle (PPE), dans le cadre de laquelle vous achetez un appartement, un bout de terrain et des parties communes (couloirs, buanderies etc.).
Le droit de superficie va en réalité permettre de dissocier la propriété du terrain de celle des constructions qui sont érigées au-dessus ou au-dessous. Dans le cas d’une villa, si vous l’achetez en droit de superficie, vous n’allez acheter que la maison (les murs), mais pas le terrain, qui va rester propriété du propriétaire initial. Vous allez alors payer une rente de superficie au propriétaire pour avoir le droit de construire une maison sur son terrain. Si on schématise à l’extrême vous allez acheter une maison mais louer le terrain qui est au-dessous.
Comme acquéreur d’une PPE en superficie, vous serez propriétaire de votre appartement mais pas du terrain sur lequel repose l’immeuble. L’ensemble de la copropriété sera titulaire d’un droit de superficie, qui sera constitué pour minimum 30 ans et au maximum 100 ans. A l’échéance de ce droit, la copropriété devra soit restituer le terrain sans les constructions, soit elle percevra une indemnité équivalant à la valeur des constructions.
Pourquoi est-ce que cette forme de propriété est décriée par les milieux immobiliers ?
Là où cela pose une certaine difficulté, qui a été décriée par la droite lors des votations, c’est que le propriétaire d’une PPE en superficie ne l’acquière pas pour toujours, puisque le droit est limité à 100 ans, et qu’il ne s’agit donc pas d’une vraie propriété.
Par ailleurs, comme vous n’achetez pas le terrain sur lequel est construit la PPE, vous ne pouvez pas bénéficier de la plus-value foncière éventuelle lors de la revente.
L’avantage, c’est que vous n’avez pas à acheter le terrain et que le prix de votre appartement sera donc sensiblement inférieur à une PPE en pleine propriété. Cela facilite donc l’accession à la propriété à un prix abordable en évitant une forme de spéculation sur la valeur du terrain lors des reventes successives.
Il y a donc des avantages et des inconvénients à cette forme de propriété qu’il faudra pondérer en fonction des contraintes et des besoins de l’acquéreur. Il faudra cependant bien s’assurer, lors de l’acquisition d’un lot de PPE en superficie, de connaître les conditions auxquelles le droit de superficie a été accordé, notamment s’agissant de la durée. Cela aura une influence déterminante sur la valeur de bien.
Moralité : l’acquisition d’une PPE en superficie peut-être une bonne opportunité d’achat mais soyez bien conseillés car l’analyse juridique n’est pas évidente mais elle est indispensable pour acheter au juste prix et en connaissance de cause.
Cédric Lenoir est avocat, spécialisé en droit immobilier de l’Etude LENOIR DELGADO & Associés.
Cédric Lenoir